Le pâturage protège la diversité avicole des marais

1 février 2005 - La rédaction 
Les prairies de marais constituent l’habitat de nombreux oiseaux. Le pâturage joue un rôle dans la protection de cet habitat. Les chercheurs de l’INRA1 s’intéressent à cette fonction du pâturage dans le maintien de la biodiversité des prairies humides. Ils étudient l’effet de différentes pratiques de pâturage sur diverses populations de petits échassiers des zones humides, communément appelés limicoles : vanneau huppé, chevalier gambette, courlis courlieu, barge à queue noire, bécassine des marais. Ces espèces patrimoniales font l’objet de priorités d’action dans la politique européenne de conservation de la nature, dans le cadre de Natura 2000.

Le lieu d’étude choisi est le marais d’Angles-Longeville dont le potentiel d’accueil de l’avifaune est important. C’est un vaste ensemble prairial (5000 ha) du marais Poitevin-Vendée (85) au sud des Sables d’Olonne (site Natura 2000 FR5200659). Sur ce territoire, une centaine d’exploitations agricoles conduisent des troupeaux de bovins avec des pratiques très diverses. Il s’agit donc de mettre en relation la diversité des pratiques de pâturage avec le maintien de la diversité des espèces d’oiseaux. Ces espèces d’oiseaux, qui nichent à même le sol, n’ont pas toutes les mêmes exigences écologi-ques : ainsi, le vanneau en phase de nidification préfère les parcelles avec une herbe assez rase (en général moins de 10 cm), alors que le chevalier utilise une gamme plus large de hauteurs d’herbe que le vanneau (jusqu’à 40 cm et plus). Mais d’autres facteurs interviennent dans le choix des par-celles par les oiseaux. La présence d’eau (au moins 20% de la surface de la parcelle) conditionne la disponibilité des ressources alimentaires : larves aquatiques, vers. La distance à la route semble également un facteur non négligeable car il peut provoquer un dérangement, surtout chez le chevalier.

Nid de vanneau.

Les exigences des oiseaux sont-elles compatibles avec la stratégie des exploitations ? Le pâturage en automne maintient une végétation rase, donc propice à l’installation des vanneaux en fin d’hiver. Pour l’agriculteur, l’opportunité de faire pâturer les animaux en automne dépend de plu-sieurs facteurs : la disponibilité en herbe, elle-même dépendante du climat et l’utilisation prévue de la parcelle au printemps suivant : fauchage, pâturage ou ensilage. Elle dépend aussi des dates de vêlage. Le pâturage en début de printemps est parfois rendu difficile quand le sol gorgé d’eau par un excès de pluie risque de s’enfoncer sous le poids des animaux. Les éleveurs possèdent en outre des types d’animaux différents (génisses, vaches allaitantes, vaches de réforme) et gèrent plusieurs parcelles différemment pour satisfaire leurs besoins.

Des seuils de pâturage optimaux

Les chercheurs ont collecté différentes données pendant une saison de reproduction (février-juillet 2004) : des données relatives aux oiseaux (hauteur de l’herbe, présence d’eau, nombre d’oiseaux, distribution des couples, nombre de jeunes par couple) et des données relatives aux pratiques de pâturage sur chaque parcelle. Pour cela, ils remettent aux agriculteurs une fiche par parcelle pour enregistrer toutes les informations utiles : période de fertilisation, périodes de pâturage, type et nombre d’animaux.

A partir de ces données, les chercheurs ont montré que le vanneau nidifie préférentiellement sur les parcelles pâturées durant l’automne précédent, où l’herbe est courte et apprécie un pâturage modéré au début du printemps qui maintient la végétation rase. Mais si le pâturage est trop intense, la fréquentation des parcelles diminue, sans doute à cause de risques trop élevés de piétinements des nids, définissant ainsi des « seuils » de pâturage. Le pâturage par des animaux peu exigeants comme les génisses ou les vaches de réforme sera alors préférable. Le chevalier gambette pour sa part semble éviter les parcelles pâturées trop tôt au printemps, mais apprécie les parcelles modérément pâturées au plein printemps, ce qui évite que la végétation ne pousse trop vite.
A partir de ces résultats, les chercheurs s’emploient à développer un modèle donnant les états de couverture végétale qui permettent de concilier l’accueil du plus grand nombre d’espèces d’oiseaux et l’alimentation des animaux d’élevage. Ecologues, zootechniciens, mathématiciens, naturalistes et agriculteurs se rencontrent autour de ce projet qui participe au développement d’une agriculture multifonctionnelle, à visée productive et environnementale.

Partenariats :

– Institut National Agronomique Paris-Grignon, unité mixte de recherche « Epidémiologie végétale et écologie des populations »
– Muséum National d’Histoire Naturelle, unité «Conservation des espèces, restauration et suivi des populations»
– Association de Défense de l’environnement en Vendée
– Chambre d’Agriculture de Vendée

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