2022, année charnière pour l’avenir du glyphosate en Europe et en France

19 janvier 2022 - Eloi Pailloux 
L’année 2022 verra le renouvellement, ou non, de l’approbation du glyphosate au sein de l'Union européenne. L'avenir de la molécule sera décidé à l'issu d'un processus relativement complexe, impliquant différents acteurs. Une certitude : la France n'a plus l'intention de se lancer dans une interdiction nationale si l'UE renouvelait l'autorisation de la molécule.

Le glyphosate sera-t-il toujours utilisable en 2023, en Europe ? L’actuelle autorisation européenne de mise en marché expire le 15 décembre prochain. La suite doit être décidée dans le cadre d’un processus de ré-homologation long et complexe. Les firmes commercialisant des produits à base de cette molécule, réunis dans le Glyphosate Renewal Group (GRG), ont constitué un dossier dès 2019. Sur cette base, quatre États membres composant le groupe d’évaluation du glyphosate (GEG), soit la France, la Hongrie, les Pays-bas et la Suède, ont rédigé un rapport remis à l’Autorité européenne de sécurité des aliments (Efsa). Celle-ci a organisé, entre septembre et novembre 2021, une consultation publique sur ce rapport.

Verdict à la fin de l’année 2022

Un autre rapport, relatif à la classification glyphosate, a fait l’objet d’une autre consultation dans le même temps, organisée par l’Agence européenne des produits chimiques (Echa), cette fois. La molécule est actuellement classée comme substance « causant des lésions oculaires graves et comme substance toxique pour la vie aquatique avec des effets à long terme ». Ces deux consultations ont réuni 342 commentaires, dont 118 par des participants français. Les résultats du dépouillement sont encore attendus. Les prochaines étapes : la publication des conclusions de l’Efsa, attendue pour juin 2022, puis le vote fatidique des États membres, à la fin de l’année.

Prises de positions médiatiques

Le cadre est donc clair. Les partisans de l’interdiction comme ceux du renouvellement de la molécule n’ont pas seulement contribué aux consultations : elles occupent le terrain médiatique. Le 14 janvier 2022, les parties prenantes de Campagne glyphosate présentaient les résultats d’une vaste campagne d’analyse d’urine réalisée entre 2018 et 2020. Si la méthodologie suivie a fait couler beaucoup d’encre, les résultats ont été mis en avant : sur les 6848 personnes ayant joué le jeu volontairement, 99,8 % présentaient un taux de glyphosate quantifiable dans les urines. Un mois plus tôt, ce sont les firmes vendant des herbicides à base de la molécule en France qui organisait un point presse, insistant sur la rigueur « sans précédent » du dossier soumis à l’Europe, évoquant la compilation de 1500 études réglementaires et plus de 12 000 études scientifiques.

Pas d’exception française

En marge de ce processus européen, quelle est la marge de manœuvre de la France ? Au début de son mandat, Emmanuel Macron souhaitait porter une interdiction à l’échelle nationale, comme les règles européennes le permettent. Mais au moment d’entrer dans le vif du sujet, le président et ses ministres successifs se sont heurtés à une réalité du terrain sans doute mal anticipée. Le 4 janvier 2022, dans un entretien au Parisien, Emmanuel Macron admettait : « Certains agriculteurs m’ont dit que si on les privait rapidement du glyphosate, ils allaient mettre la clé sous la porte, parce que leurs concurrents espagnols ou italiens, eux, pouvaient continuer à s’en servir. » Il est désormais convaincu de l’utilité d’agir au niveau européen sur ce dossier. Et le parlementaires français le suivent : le 13 janvier, l’Assemblée nationale a rejeté une proposition de loi de La France Insoumise visant une interdiction anticipée de la molécule en France. A cette occasion, le ministre de l’Agriculture, Julien Denormandie, a rappelé ses positions : ne pas interdire des produits en l’absence d’alternatives. « La transition agroécologique ne se décrète pas pas par injonction, les transitions ne sont possibles que si on ne laisse personne sans solution. »

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